Philobitude
Né en 1910, Raoul Ubac est un artiste belge. Son œuvre peinte, photographique et décorative trouve sa cohérence dans une recherche de l’insolite et d’une mise en valeur constante de la force de la matière.
Photographe, sculpteur, peintre puis graveur inclassable, Raoul Ubac survole les courants du XXe siècle, et surprend par des pièces d’une rare puissance.
Il naît à Malmédy, dans les Ardennes belges, au sein d’une famille bourgeoise. D’origine belge et allemande, il grandit entre deux zones linguistiques et géographiques. Son enfance est marquée par de longues promenades dans la campagne, ainsi que par un goût prononcé pour la solitude. Après sa scolarité, Ubac entame une longue marche à travers l’Europe. Muni de son appareil photo, il photographie les paysages du vieux continent, comme les roches maritimes de la Dalmatie.
En 1928, alors qu’il est de passage à Paris, il rencontre Otto Freundlich, peintre constructiviste, et découvre la peinture surréaliste. Les principes du groupe le séduisent : désireux, comme eux, de révéler les mécanismes du rêve et de l’inconscient à travers l’art, il s’adonne à la création avec passion. C’est dans la revue surréaliste Minotaure que Raoul Ubac publie ses œuvres pour la première fois. Son travail photographique révèle une curiosité jamais assouvie, puisqu’il explore chaque aspect technique du médium, comme dans son Autoportrait solarisé.
Après la Seconde Guerre mondiale, il s’éloigne pour de bon du surréalisme, un pas qu’il accomplit en publiant La Beauté Aveugle dans la revue Troisième convoi en réponse à l’article La Beauté convulsive d’André Breton. De la même manière, Raoul Ubac abandonne la photographie qui ne lui permet pas, selon lui, de trouver l’insolite, le trésor transcendant qu’il recherche. Dans les années 1950, ses thèmes principaux sont la campagne, et Ubac représente à plusieurs reprises des éléments issus du monde de l’agriculture. L’artiste se consacre de plus en plus à ses recherches sur la couleur et le motif, tendant vers un art informel.
Quittant Paris et sa foule, il s’installe dans l’Oise. C’est à cette époque qu’Ubac fait par hasard la découverte de l’ardoise lors d’un voyage en Haute Savoie, matériau qui révolutionne son approche de l’art par son aspect brut et naturel. S’ouvre pour lui la période des sculptures d’ardoise, qui seront exposées avec un vif succès en France et dans le monde. Ses toiles de la période reproduisent de multiples fois des traits resserrés, représentant les champs de labour, aboutissant à des compositions très denses, souvent réalisées dans un noir profond. Par la suite, Raoul Ubac explore des thèmes variés, comme les torses et les corps humains dont il réalise de nombreuses séries.
En 1968, son œuvre fait l’objet d’une vaste rétrospective au Musée d’Art moderne de Paris. Représenté par la Galerie Maeght depuis 1950, il édite avec elle un recueil de monographies ainsi que plusieurs catalogues dans les années 1970. Par ailleurs, Raoul Ubac a répondu dès 1957 à de nombreuses commandes publiques : bas-reliefs pour une buvette d’Evian, vitraux et mosaïques pour des églises et des bâtiments scolaires… Adepte du dessin et de la gravure, Raoul Ubac a aussi beaucoup illustré des recueils de poèmes de ses amis. De ses photographies à ses gravures, les pièces artistiques d’Ubac accueillent toujours le contraste, se partageant sans cesse l’ombre et la lumière de la surface de l’œuvre. Vers la fin de sa carrière, Ubac inaugure une nouvelle série, des sculptures en stèles, formant parfois des têtes humaines rappelant les sculptures des temps primitifs. Sans pour autant être religieux, Ubac a ainsi toujours cherché à saisir ce qui anime l’homme et ce qui le tend vers sa spiritualité. Il meurt en 1985 à Dieudonné, dans sa maison de l’Oise.